12 Avril 2023

Mission

Objectifs Scientifiques

La théorie généralement admise pour décrire la gravitation est la théorie de la Relativité Générale. Elle est fondée sur le Principe d'Équivalence. Einstein a en effet promu ce principe, considéré comme empirique depuis Galilée et Newton, au statut de postulat de départ de sa théorie.
Selon ce principe les lois physiques dans un référentiel tombant en chute libre dans un champ de gravitation sont équivalentes aux lois physiques dans un référentiel inertiel. Une conséquence élémentaire du principe peut s'énoncer ainsi : la trajectoire d'un corps tombant en chute libre (c'est-à-dire un corps qui n'est soumis à aucune interaction de type électromagnétique par exemple) ne dépend ni de sa structure interne ni de sa composition.
La principale raison pour tester ce principe vient du fait que la gravitation, première des interactions fondamentales connues, résiste aux tentatives d'unification avec les autres interactions fondamentales (électromagnétique, nucléaire faible et nucléaire forte). Celles-ci sont décrites selon un modèle de théorie quantique des champs, le Modèle Standard de la physique des particules, alors que la gravitation est décrite par une théorie classique (par opposition à quantique), la Relativité Générale, qui relie la géométrie de l'espace-temps à la densité de matière-énergie qu'il contient. Les théories d'unification les plus récentes, telles que la théorie des cordes, cherchent ainsi à trouver une description cohérente de la gravitation et des autres interactions. Dans tous les cas, ces théories prédisent l'existence d'une nouvelle interaction dépendant de la composition des corps. Quelle que soit son origine, une éventuelle nouvelle force pourrait, en se superposant à la gravitation, être mise en évidence comme une violation du Principe d'Équivalence. Tester le Principe d'Équivalence, en particulier à travers l'universalité de la chute libre, c'est donc chercher aussi l'existence et les caractéristiques de cette nouvelle interaction.

  • Le principal objectif de la mission est de tester le Principe d'Équivalence (PE) avec une précision de 10-15, c'est-à-dire 100 fois meilleure que la précision des expériences réalisées à l'heure actuelle sur Terre aussi bien avec un pendule à torsion ou sur la Lune par Laser.

    En démontrant qu’il n’y avait pas de violation du principe d’équivalence jusqu’à des niveaux de précision de l’ordre de 10-15, Le résultat de cette expérience a permis d'orienter les théories de la gravitation. L’absence de violation à ce niveau est par ailleurs en totale adéquation avec l’observation directe d’ondes gravitationnelles par les observatoires LIGO (2015) puis VIRGO (2017).

    La mission MICROSCOPE utilise la Terre comme source gravitationnelle de cette expérience de physique fondamentale dans l'espace. On contrôle que le mouvement en orbite de deux masses de composition différente tombant dans le champ gravitationnel de la Terre est identique, en faisant attention à ce que les deux masses soient soumises exactement au même champ gravitationnel.

  • Cette expérience spatiale profite du fait que le satellite est un "cocon" qui protègera les instruments des forces perturbatrices (les forces non gravitationnelles, appliquées au satellite, sont compensées par la mise en œuvre des micropropulseurs ioniques), de l'absence totale des fluctuations du gradient de gravité et de l'absence de perturbations dues à l'activité humaine.

    La possibilité d'avoir de très longues périodes d'observation des mouvements de masses en apesanteur dans des conditions très stables conduit à l'intégration de mesures faites sur plusieurs jours, ce qui permet de rejeter les perturbations stochastiques (aléatoires).

    La rotation de la fenêtre d'observation par rapport au champ gravitationnel, aide aussi dans la discrimination du signal d'une éventuelle violation du Principe d'Équivalence. Pour améliorer la précision de la mesure, plusieurs fréquences et phases de rotation ont été considérées.

  • La compensation de traînée du satellite met en jeu des micropropulseurs à jets de gaz. Cette technologie, d'une extrême précision, ouvre la voie à d'autres missions scientifiques nécessitant de compenser la traînée et de façon plus générale toutes les forces non gravitationnelles. Elle est aussi prometteuse pour la préparation des missions futures comportant plusieurs vaisseaux spatiaux en formation, leur trajectoire relative devant être contrôlée avec une très grande précision.

Mission

Le satellite a été placé sur une orbite circulaire héliosynchrone à 710 km d'altitude avec un nœud ascendant à 18 heures.

L'expérience de test du Principe d'Équivalence, qui est l'objectif principal de cette mission, ne requière en théorie qu'une semaine de mesures en continu. Mais la préparation de cette expérience nécessite des périodes d'étalonnage très longues (plusieurs mois). De plus elle doit être reproduite plusieurs fois dans des conditions variées pour éliminer tous les effets parasites.

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Présentation de la mission
© CNES/GEKO/ Prodigima films, 2015
(format MP4, ~141 Mo)

Pendant les phases de mesure, le satellite est orienté suivant 2 modes principaux :

  • un mode inertiel (fixe par rapport au Soleil et aux étoiles),
  • un mode "spinné" : rotation lente autour de l'axe de l'orbite pour augmenter la fréquence du signal gravitationnel (de l'ordre de 3 ou 4 fois plus).

Pendant les phases d'étalonnage, le satellite subit des sollicitations angulaires et linéaires programmées pour identifier très finement les paramètres des accéléromètres.

L'orbite choisie permet d'assurer au satellite des périodes de 9 mois en continu sans passage dans l'orbite de la Terre, ce qui permet de réaliser l'ensemble des phases de mesures et d'étalonnage sur une durée de mission de 2 ans.